Je dois admettre qu’avant de suivre des cours d’hygiène alimentaire en faculté de médecine, les fibres ne me semblaient pas particulièrement intéressantes. Je pensais tout connaître à leur sujet. On en prend quand on a besoin d’aller aux toilettes, et c’est tout. N’est-ce pas ?

Faux. Quelques années de formation en nutrition plus tard, je suis une grande partisane de l’augmentation des fibres dans les régimes alimentaires occidentaux. Pourquoi ?

Parce que les fibres sont un aliment médicinal sûr et peu coûteux qui a de nombreux bienfaits sur l’ensemble de l’organisme, et pas seulement sur l’appareil digestif. Il existe toutefois différents types de fibres, c’est pourquoi la science joue un rôle important pour choisir celles qui sont bénéfiques pour la santé. Voilà pour les faits.

L'impact des fibres sur la santé

Les fibres peuvent être utiles en cas de problèmes de santé tels que les allergies, la toxicité des métaux lourds, les troubles cognitifs, l’asthme, les éruptions cutanées, les maladies inflammatoires de l’intestin, l’ostéoporose, etc. Il semblerait même qu’elles contribuent à allonger la durée de vie.

Oui, vous avez bien lu ! Une consommation régulière de fibres pourrait vous aider à vivre plus longtemps !

Si un médicament pouvait agir aussi bien que les fibres, je suis convaincue que la dose coûterait un million de dollars. Si on ajoute à cela la rareté de leurs effets secondaires, on a là quelque chose d’incroyablement efficace, sûr et précieux, qui surclasse de loin toutes les autres pilules.

Mais comme ces fruits et légumes sont directement disponibles à l’épicerie du coin, nous les négligeons souvent ou les tenons pour de simples médicaments. Pour le bien de votre peau, de vos intestins et de votre espérance de vie, vous devez vraiment les consommer.

Cet article a pour but de vous présenter les fibres, leurs différentes formes et la manière de les utiliser efficacement et stratégiquement pour en tirer des bienfaits particuliers pour la santé. Plongeons dans le vif du sujet.

Que sont les fibres ?

Les fibres sont des amidons que l’appareil digestif humain n’est pas en mesure de décomposer complètement en sucre. Ce sont donc des glucides qui proviennent uniquement d’aliments végétaux et céréaliers comme les légumes, les tubercules, les céréales, les légumineuses, les fruits à coque et les graines.

Les viandes, les œufs, les fromages ou les huiles n’en contiennent pas. Quand on parle de fibres, on parle de plantes.

Pourquoi faut-il consommer des fibres avec de l’eau ?

L’équation fibres + eau est bien connue lorsqu’il s’agit de faire transiter des aliments dans le tube digestif. Toutefois, si vous l’ignorez, laissez-moi vous donner quelques précisions. Elles ne sont efficaces pour améliorer le transit intestinal que si elles sont ingérées avec de l’eau.

C’est pour cette raison que les instructions d’utilisation des fibres en poudre indiquent toujours de les prendre avec un grand verre de liquide. Que se passe-t-il si vous les prenez seules, sans eau ? Cela peut en fait vous constiper, soit tout le contraire de ce que vous espériez !

En effet, dans le tube digestif, les fibres et l’eau génèrent une hausse de la pression osmotique qui attire davantage de fluide à travers les membranes du côlon. Cela stimule le péristaltisme, à savoir l’ensemble des contractions musculaires permettant la progression des selles dans les intestins. Sans eau, les fibres ne font que multiplier le volume qui ne peut être évacué. Elles restent alors bloquées, et vous ne pouvez pas évacuer efficacement les matières fécales.

Par conséquent, que devez-vous faire ? Lorsque vous consommez un complément de fibres, vous devez toujours le prendre avec de l’eau ou comme indiqué sur l’emballage. Ainsi, il agira comme vous le souhaitez.

Il existe également d’autres façons d’optimiser et de biohacker votre consommation de fibres.

Les sources de fibres

Les fruits et légumes

L’avantage de manger des fruits et légumes frais comme source de fibres est qu’ils fournissent un rapport idéal entre les fibres et la partie liquide, de sorte que vous n’avez pas à vous soucier de l’eau. Cela reste vrai même si vous consommez des fruits semi-séchés comme les pruneaux.

Les aliments riches en fibres sont généralement délicieux et contiennent une foule d’autres éléments bénéfiques pour la santé humaine. Pour la plupart d’entre nous, manger un brownie aux haricots noirs et à l’avocat, préparé avec de la farine sans gluten, est bien plus savoureux que de prendre une pilule de fibres.

Heureusement, ces deux options sont excellentes pour faire grimper le nombre de fibres.

Les fruits à coque et les graines

Une autre bonne solution pour un apport accru en fibres est d’ajouter des fruits à coque et des graines à vos recettes habituelles ou comme collation saine pendant la journée.

Je conseille souvent à mes patients d’ajouter des graines de lin et de chia à des aliments tels que les flocons d’avoine, les mélanges à pâtisserie et même des plats salés comme les ragoûts et les soupes. L’avantage de ces graines riches en fibres est qu’elles contiennent également des acides gras oméga-3 essentiels pour la santé humaine.

Les compléments de fibres

Enfin, si vous n’aimez pas ou ne parvenez pas à manger suffisamment de fruits, de légumes, de fruits à coque ou de graines, vous pouvez prendre un complément de fibres pour garantir l’apport cible de 25 g par jour fixé par l’American Heart Association. Je le répète, n’oubliez pas de l’avaler avec beaucoup d’eau.

Des fibres pour vous aider à vous détoxifier quotidiennement

Imaginez un peu les fibres comme le balai du tube digestif. Dans la mesure où elles ne se dissolvent pas en liquide dans les intestins, elles restent intactes et aident à évacuer les déchets à la manière d’un balai. C’est parfait si vous cherchez à vous détoxifier quotidiennement !

Aujourd’hui, le mot « détox » est utilisé à tout va. C’est regrettable, car notre corps détoxifie lui-même notre sang et nos cellules chaque jour lorsqu’il fonctionne correctement. C’est de la physiologie humaine de base. Si notre corps ne se débarrassait pas des résidus de réactions enzymatiques, nous mourrions. La détoxification est donc un processus naturel et indispensable.

Elle ne se fait pas au moyen d’un remède ou d’une pilule spéciale, mais plutôt de façon naturelle, en mangeant de bons aliments, en buvant beaucoup d’eau et en consommant suffisamment de fibres. Voilà pour l’aspect scientifique.

Le mécanisme de détoxification naturelle de notre corps

Nos systèmes lymphatique, hépatique, rénal, cutané et digestif sont des organes « émonctoires » de l’organisme. Autrement dit, ils sont chargés d’excréter les bioproduits nocifs de chaque réaction enzymatique, ainsi que les toxines environnantes auxquelles nous sommes exposés. Ces organes sont nos systèmes de détoxification naturels.

Notre foie, en particulier, filtre chaque jour la totalité de notre sang. Il en extrait les toxines et autres déchets, puis les soumet aux phases détox I et II.

Ensuite, il concentre les toxines inactivées et liées à des composés dans la bile, qui est stockée dans la vésicule biliaire. Cette dernière sécrète ensuite la bile dans le tube digestif, où elle se lie aux fibres.

Enfin, le tout doit être évacué du corps par les selles. En clair, vous êtes censé(e) déféquer ces toxines !

Imaginez maintenant la situation si vous n’avez pas assez de fibres pour fixer ces toxines, ou si vous n’avez pas suffisamment de fibres pour aller à la selle au moins une fois par jour. Les toxines restent dans le tube digestif et sont réabsorbées dans la circulation sanguine. À la longue, elles s’accumulent et peuvent causer des problèmes dans l’organisme. Citons la constipation, la dysbiose, les symptômes de dominance œstrogénique (prise de poids, acné, syndrome prémenstruel, troubles de l’humeur) et même des intoxications aux métaux lourds si vous travaillez ou vivez dans un environnement où vous y êtes régulièrement exposé(e) (la soudure, par exemple).

Sans fibres, vous ne pouvez pas vous détoxifier autant que nécessaire. Cependant, si vous veillez à respecter le bon rapport fibres/eau, cela ne devrait pas vous causer de problème.

Les fibres peuvent être bénéfiques pour la santé intestinale

Les fibres nous apportent les amidons prébiotiques nécessaires pour nourrir les bactéries saines (les probiotiques) de notre système gastro-intestinal. Ces derniers sont chargés de maintenir l’équilibre de notre flore en empêchant la prolifération de bactéries et de levures nuisibles.

Un microbiote intestinal sain réduit les risques de symptômes digestifs, notamment les ballonnements, les indigestions et les sensibilités alimentaires. De plus, cela vous donne plus de chances d’avoir une peau nette, comme nous l’expliquons ci-dessous.

La relation intestin/peau et l’acné

La santé intestinale a un impact direct sur celle de la peau, car toutes deux ont un point commun : le microbiome. Il s’agit de l’ensemble des bactéries, levures et autres éléments qui colonisent notre peau et les surfaces des muqueuses.

Des études ont révélé que nous abritons plus d’ADN bactérien dans notre organisme que notre propre ADN. C’est dire l’importance des bactéries pour la santé humaine !

Pour être bien portant, l’intestin nécessite un éventail diversifié et vigoureux de bonnes bactéries, ou probiotiques. Cela contribue à réguler la motilité, l’immunité, et plus encore, pour que tout se fasse comme il se doit. Cela affecte également le degré général d’inflammation, l’équilibre hormonal et la production de sébum sur votre peau ! En effet, les microbiomes de la peau et de l’intestin sont interconnectés. Lorsque le tube digestif est en mauvais état, la peau peut l’être aussi.

Des études montrent, par exemple, que les personnes avec une alimentation riche en glucides simples et pauvre en plantes fibreuses sont plus susceptibles de souffrir d’acné et d’éruptions cutanées que celles qui suivent un régime à base d’aliments complets et pauvre en glucides. La science avance l’hypothèse que cela pourrait être dû à des perturbations du microbiome.

Alors faites bon usage de ce constat ! Mangez des tonnes de fibres saines pour préserver la santé de vos intestins et vous verrez la qualité de votre peau s’améliorer en conséquence.

Les fibres peuvent contribuer à réduire les éruptions cutanées

Les fibres freinent également deux processus immunitaires susceptibles de créer des éruptions allergiques/chroniques et des troubles cutanés tels que l’eczéma et le psoriasis.

La première est la dégranulation des mastocytes. Il s’agit d’une expression générique qui désigne le processus par lequel nos cellules immunitaires libèrent de l’histamine, une molécule excitatrice qui induit une vasodilatation. La perméabilité accrue des vaisseaux sanguins qui en résulte entraîne la propagation de fluides à des endroits inopportuns de notre peau et de nos organes. Avez-vous déjà souffert d’urticaire et été capable de percevoir du liquide sous votre peau ? Ou encore d’une inflammation causée par une éruption cutanée bosselée de cloques ? De l’histamine en veux-tu en voilà !

Parvenir à réduire l’activité de cette cytokine est un moyen de réduire potentiellement la fréquence de vos crises d’urticaire. Une étude (citée plus bas dans la section Références ci-dessous) a constaté que les fibres alimentaires étaient en mesure d’inhiber la dégranulation mastocytaire, réduisant ainsi le nombre d’éruptions cutanées. Cela vaut donc la peine de tester les fibres pour soigner vos « rougeurs », surtout si votre médecin vous y encourage.

La deuxième façon dont les fibres contribuent à réduire certaines éruptions cutanées (aussi appelées dermatite atopique) consiste à limiter la production d’immunoglobulines (Ig) par le système immunitaire. En effet, celles-ci sont impliquées dans un grand nombre de fonctions du système immunitaire, dont la réponse allergique. Un taux élevé d’Ig est généralement associé à des troubles tels que la dermatite atopique, l’asthme et les allergies aériennes.

Ce qu’il faut retenir : vous voulez dire adieu à vos éruptions cutanées ? Songez à ajouter davantage de fibres à votre alimentation pendant plusieurs semaines et observez le résultat. Demandez conseil à votre médecin pour établir un régime plus spécifique en fonction de l’état de votre peau et faites-lui part des fibres pendant cette discussion.

Comme vous avez pu le constater, elles améliorent la digestion, aident à prévenir la dysbiose intestinale, réduisent les problèmes de peau, notamment les éruptions cutanées et l’acné, et peuvent remédier à la constipation. Voilà une formidable solution diététique qui a bon goût, qui coûte peu cher et qui a des effets puissants et généralisés sur votre santé.

Références :

  1. Chen, Jia-Ping, et al. “Dietary Fiber and Metabolic Syndrome: A Meta-Analysis and Review of Related Mechanisms.” Nutrients, vol. 10, no. 1, 26 Dec. 2017, p. 24, www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5793252/, 10.3390/nu10010024. Accessed 17 Jan. 2021.
  2. Chen, Kangning, et al. “Dietary Fiber Intake and Endometrial Cancer Risk: A Systematic Review and Meta-Analysis.” Nutrients, vol. 10, no. 7, 22 July 2018, p. 945, www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6073518/, 10.3390/nu10070945. Accessed 17 Jan. 2021.
  3. Dai, Zhaoli, et al. “Association Between Dietary Fiber Intake and Bone Loss in the Framingham Offspring Study.” Journal of Bone and Mineral Research, vol. 33, no. 2, 7 Nov. 2017, pp. 241–249, www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5990003/, 10.1002/jbmr.3308. Accessed 17 Jan. 2021.
  4. Folkerts, Jelle, et al. “Effect of Dietary Fiber and Metabolites on Mast Cell Activation and Mast Cell-Associated Diseases.” Frontiers in Immunology, vol. 9, 29 May 2018, www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5992428/, 10.3389/fimmu.2018.01067. Accessed 17 Jan. 2021.
  5. Hogenkamp, Astrid, et al. “Supplementation of Mice with Specific Nondigestible Oligosaccharides during Pregnancy or Lactation Leads to Diminished Sensitization and Allergy in the Female Offspring.” The Journal of Nutrition, vol. 145, no. 5, 1 Apr. 2015, pp. 996–1002, pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/25833889/, 10.3945/jn.115.210401. Accessed 17 Jan. 2021.
  6. Kivit, S., et al. “Galectin-9 Induced by Dietary Synbiotics Is Involved in Suppression of Allergic Symptoms in Mice and Humans.” Allergy, vol. 67, no. 3, 9 Jan. 2012, pp. 343–352, pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/22229637/, 10.1111/j.1398-9995.2011.02771.x. Accessed 17 Jan. 2021.